Samedi 06 déc. 2025 - HÔTEL DES VENTES D'AVIGNON - Avignon

Dirck van BABUREN (1595 - 1624)

Loth et ses filles

Toile

99 x 146 cm

Signé en haut a gauche "t.d... Baburen/fecit F... 1622"

Estimation : 150 000 - 200 000 €

Provenance : Marché d'art parisien en 1947, vente à Paris, Drouot, 8 décembre 1948, n°26 ( 90 x 120 cm), collection Pierre Landry en 1965. Après une brillante carrière de tennisman international, Pierre Landry exerce comme antiquaire et est l'un des premiers a redécouvrir le courant caravagesque dans les années 1930. Il est notamment connu pour avoir cédé Le Tricheur à l'as de carreau de Georges de la Tour au Musée du Louvre en 1972. 

Exposition : Milan, Palazzo Reale, Mostra da Caravaggio e dei Caravaggeschi, 1951, pp.44, 46, cat n°68, planche 61 (catalogue par Roberto Longhi)

 

Bibliographie :
Leonard J. Slatkes, Dirck van Baburen (c. 1595-1624) : a Dutch painter in Utrecht and Rome, 1965, p. 68, 71-72, 119-120, no. A15, fig. 19
Wayne E. Franits,The Paintings of Dirck Van Baburen ca. 1592/93–1624 Catalogue Raisonne, Amsterdam, John Benjamin Publishing Company, 2013, p.118, n°A21, reproduit p.296, plate 21.

 

Notre tableau est répertorié au R.K.D (Rijksbureau voor Kunsthistorische Documentatie) sous le permalien n°309775.

 

Malgré une carrière brève, Baburen est une figure centrale du caravagisme d’Utrecht. Elève de Paulus Moreelse, il est inscrit à la guilde de Saint-Luc d’Utrecht en 1611. Il part à Rome au milieu des années 1610, où il entre en contact avec les oeuvres de  Caravage, assimilant son naturalisme et son usage dramatique du clair-obscur. Il partage un appartement avec David De Haen, non loin de celui de Bartolomeo Manfredi. Ses mécènes sont les mêmes que ceux de Caravage, Vincenzo Giustiniani et le cardinal Scipione Borghese. Collectionneur de José de Ribera, Pietro Cussida lui commande en 1617 la Mise au tombeau pour l'église San Pietro in Montorio à Rome, et plusieurs autres oeuvres.  Les peintures de Baburen, souvent religieuses et ses scènes de genre se rapprochent de celles de ses compatriotes Hendrick Ter Brugghen et Gerrit van Honthorst par leur choix d'une gamme colorée claire. Il rentre dans  sa ville natale d'Utrecht à la fin de 1620 ou au début 1621, soit juste avant la date de notre toile, et disparait quatre ans plus tard.

Le sujet de notre toile est tiré de la Bible, du Livre de la Genèse, chapitre XIX . Il a souvent été représenté par les peintres au XVIIe siècle, que ce soit la famille de Loth, guidée par les anges, quittant la ville de Sodome ou l'épisode suivant où Loth est enivré par ses filles. Citons d'autres versions de ce thème de Loth et ses filles par des artistes contemporains : Joachim Wtewael (Musée de l'Hermitage, circa 1600) Simon Vouet (Musée des Beaux-Arts de Strasbourg, 1633) Orazio Gentileschi (J. Paul Getty Museum, 1622). Dans notre toile, les figures sont saisies dans des poses dynamiques ; le rougeoiement du second plan accentuant la tension dramatique. Celle qui verse le vin engage le spectateur par son regard direct, rare dans les représentations de ce sujet, renforçant la dimension érotique de la scène.

Le peintre a ajouté plusieurs figures en arrière-plan créant une profondeur narrative inhabituelle. Les turbans portés par les deux femmes rappellent d’autres œuvres de l’artiste, comme La Charité romaine  (York Art Gallery, York)  ou la Femme jouant du luth (collection Luigi Koelliker). Ses peintures religieuses empruntent souvent l'aspect trivial des sujets bacchiques, brouillant les frontières entre peintures d'histoire et scènes de genre.

Une variante du personnage du Loth, transformé en buveur, attribué à Baburen a été exposée à Londres en 2004. Cette figure et la sensualité de notre composition ont inspiré des peintres plus jeunes, notamment Jan van Bijlert, par exemple dans l'Allégorie des cinq sens (Hanovre, Niedersächsisches Landesmuseum Hannover) et Le Banquet des dieux (Dijon, musée Magnin).